2006/05/08

et fin

(Ceci est vraiment le dernier billet sur Xian, jure crache)

Nous sommes a Chengdu depuis un peu plus d'une semaine. Une petite grippe nous a ralenti un peu. Mais maintenant nous sommes prets pour la continuation. Nous quittons ce soir pour Lijiang, une ville qui a ete declaree patrimoine mondial par l'Unesco. On vous en redonne des nouvelles. Mais aujoud'hui je voulais vous parler une derniere fois de Xian. Vous raconter notre depart en train. Ce fut une experience unique pour nous qui avons deja quelques "runs" de trains chinois et indiens dans le corps.

Le voyage Xian Chengdu n'a rien de bien particulier. 18 heures de nuit, on voulait donc une couchette. C'est la facon dont on a obtenu nos billets et surtout comment on a reussi a monter "a bord" comme on dit, qui est speciale.

On s'y etait pris d'avance pourtant pour acheter nos billets. Mais c'etait le debut du long conge du Ier mai. L'agent de voyage du Ludao Hotel nous avait averti que ce ne serait peut-etre pas possible, mais que lui il pourrait toujours nous trouver un lit, si on etait pret a payer la commission. On tente notre chance pour acheter notre billet nous-memes. On se rend a la gare. Des milliers de personnes faisaient la queue devant et tout autour de nous. Quelqu'un essaie de se faufiler dans une des files d'attente menant a un guichet. Il a failli se faire scalper! On se rappelle qu'a chaque jour, il y a 10 millions de Chinois qui prennent le train. Au debut du plus important conge de l'annee, il doit y en avoir le double! Apres 30 minutes d'attente on finit par se pointer au guichet. La preposee parle anglais. Mais il n'y a pas de billet pour le jour ou on veut partir. Nous sommes a ce moment la, 5 jours d'avance. On decide de laisser tomber les billets de premier classe qu'elle nous offre, comptant bien nous rabattre sur l'agence de voyage de notre hotel. Et effectivementle prepose de l'hotel nous promet les 2 billets de "hard sleeper" (couchette pas si dure que cela, en fait). On doit lui remettre 200 yuans par billet. Le prix etait de 122 a la gare. La commission? On ne sait trop. Seul hic, on ne peut avoir les billets avant le jour meme du depart. Hmmmm. Finalement on accepte, n'ayant pas le choix, a moins de passer encore quelques jours a Xian.

Les jours suivants on passe regulierement pour voir si nos billets sont arrives. Chaque fois la preposee est mal a l'aise. On ne comprend pas trop ce qui se passe. Le matin de notre depart, le midi, l'apres-midi, toujours pas de billet d'arrive. On est assis dans le hall de l'hotel, ayant du quitter notre chambre a midi, sirotant nos bieres tranquillement. Je ne suis pas inquiet, me disais-je, zenistement. Au pire, on couchera dans le lobby de l'hotel! Mais vu que je ne suis pas vraiment bouddhiste et zen, la pression montait tout de meme un peu a chaque heure qui passait sans billet. La preposee passe son temps a me dire "Don't worry about your ticket." La veille, quelqu'un m'a dit qu'on les aurait probablement 30 minutes avant notre depart. Je croyais que c'etait une farce de pince sans rire.

Mais non. C'est effectivement ce qui s'est passe. J'ai fait du sang de cochon toute la soiree, moi qui aime toujours etre rendu au moins deux heures a l'avance pour eviter tous les pepins possibles.

En fait on n'a jamais eu de billet. Le train partait a 22h. A 21h30 une preposee de l'agence de voyage est venue nous chercher et nous dit dans un anglais impeccable qu'il est temps de partir. On enfourche nos sacs a dos. La gare est a 10 minutes de marche. Dehors c'est un veritable capharnaum. Des dizaines d'autobus, de taxis, des milliers de pietons qui convergent vers la gare. L'air est difficile a respirer. En plus c'est la premiere journee de chaleur depuis notre arrivee dans cette ville. J'ai de la difficulte a respirer avec tout ce qui sort des vehicules qui circulent en faisant hurler leur klaxons.

Arrives a l'entree de la garre c'est la pagaille. Tout le monde veut passer son sac dans la machine a detecter le metal en meme temps. On reussit a entrer. La on rencontre 3 hommes qui ont chacun deux cellulaires en main. Discussion avec la preposee Je m'apercois qu'elle a nos 400 Yuans en main. Elle est calme, souriante. Je commence a comprendre ce qui se passe. Je crois qu'elle est en train d'acheter des billets d'un "scalpeur", comme ceux qu'on trouve a l'entree du Centre Bell avant un match ou un spectacle. Ils ont les deux masses en l'air. Ca crie. mais ca ne m'impressionne pas trop. Les Chinois parle toujours tres fort. On a toujours l'impression que la bagarre va pogner d'une minute a l'autre. Mais non. Tout a coup on se remet en mache. Je me demande bien comment on va faire. Il doit y avoir 5 000 personnes dans le hall, soit qui arrivent soit qui partent. On n'arrivera jamais a prendre le train a temps. Il ne reste plus que 15 minute et on a toute cette foule a traverser.

C'etait sousestimer l'entrepreneurship chinois. Le groupe se met a nouveau en branle et on monte deux etage. On entre dans la salle d'attente de la premiere classe. Ici c'est silencieux. Il n'y a presque personne. Rencontre d'un autre "contact". En uniforme celui-la. Les cellulaires se font aller les batteries. Ca placotte fort. On semble negocier, allez savoir. La preposee de l'agence de voyage est toujours impassible. Elle s'inquiete de mon etat. Je suis a bout de souffle, j'ai chaud et j'ai hate d'etre etendu dans la couchette promise, mais a part cela tout va tres bien madame la marquise. Apres quelques minutes on se remet a nouveau en branle. Des corridors sombres, des escaliers a descendre. On se promene dans les catacombes de la gare. Le prepose en uniforme ouvre une porte et nous voici sur le quai. Presqu'en meme temps le train entre en garre. Des gens debarquent. On lance des boites lourdes sur le quai. Et nous on court vers un wagon particulier: le 13. Nouvelle discussion. Nouveau telephonage. Des gens se pressent pour embarquer. Bousculade. Tout le monde veut partir en vacance! Dans quel h... de bord.... sommes nous embarques?

Le train siffle et la tout se complique. On est sur le depart et les negociations ne semblent pas encore terminees! Que faire? La preposee de l'agence de voyage me glisse dans la main mes 400 Yuans en nous montrant l'escalier du train. Elle me dit: "This is all I can do for you!" On hesite. Finalement je monte, serrant notre pognon. On verra bien. Helene se fait pousser dans le dos pour monter, le train est en marche. (C'est la 2e fois que je la vois prendre un train en marche. La premiere j'ai ete tres surpris, mais la, je ne l'ai presque pas remarque.)

On se retrouve dans un wagon ou les gens sont tous entasses. Je me vois oblige a faire les 18 heures du voyage debout dans un corridor etroit ou, au mieux, assis sur mon sac a dos. Helene passe proche d'ecraser, dans sa chute, une pauvre femme deja assise par terre. Heureusement quelqu'un lui saisit le bras juste a temps. La nuit va etre longue.

Mais non. En fait le train n'est pas si bonde que je ne le pensais. C'est juste ce wagon-ci. Et seulement devant le bureau du prepose aux reservations. En Chine, si on ne peut avoir une couchette dans un train on peut acheter un billet ordinaire et par la suite payer la difference et se faire "upgrader" comme on dit ici. Tout a coup le dernier prepose en uniforme rencontre au pied du wagon et qui etait monte a bord tout de suite avant nous, prend les Yuans que je tenais pas trop fermement, les lance sur le bureau du responsable. Deux secondes plus tard j'ai un recu en main et le prepose me fait signe de le suivre. (Apres analyse serieuse, ce recu qui a toutes sortes de details est au montant exact de 400 Yuans.) On doit se rendre au wagon 5. Il faut traverser 8 wagons pleins, dans un train en marche, avec nos gros sacs a dos! Nos sacs sont de plus en plus lourds, les corridors de plus en plus etroits, le train balotte de plus en plus, mais, de peine et de misere et sans trop faire de degats aux pieds des passagers rencontres on s'est rendus au wagon 5. La le prepose net la main sur 2 couchettes du bas. Les lumieres sont tamisees. Il fait frais. Le bonheur total. Il y a meme un bouteille thermos, comme on dit en France, pleine d'eau bouillante. On se fait du the, silencieusement pour ne pas deranger les 2 voyageurs qui sont sur les 2 couchettes du haut. Il n'y a personne sur celle du milieu. Helene me dit, avec un grand sourire, "H.... que la vie est belle."

Et ils passerent une tres bonne nuit.

Le prochain billet va etre moins long et plus illustre, jure crache.

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